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01 Oct
01Oct

« Allez à ma vigne, vous aussi ! » (Mt. 20, 4) LECTURES 

  • Is. 55, 6-9
  • Ps 144 (145), 2-3. 8-9. 17-18
  • Ph 1, 20c-24. 27a
  • Mt 20, 1-16


Mgr le Vicaire Général,
Révérends Pères, 

Révérendes Sœurs, 

Révérends Frères, 

Chers frères et sœurs dans le Seigneur,

1. La semaine de réflexion et d’échanges autour du thème général de la mission s’achève aujourd’hui avec cette eucharistie d’ouverture et de lancement des activités de l’année pastorale 2023-2024. Nous avons, en Eglise, vécu des jours particulièrement bénis et enrichissants. Venus de quatre coins de notre Archidiocèse, nous avons accueillis avec gratitude la grâce que la bonté miséricordieuse de Dieu nous a faite : la grâce de la rencontre, la grâce de l’accueil et de l’ouverture à l’autre ; la grâce de la disponibilité de l’écoute bienveillante de la parole de l’autre, pour nous enrichir mutuellement. Au seuil de cette nouvelle année pastorale, ponctuée de réflexions, d’échanges et de prières, nous saisissons mieux la richesse que représente une rentrée pastorale. Telle est l’Eglise que le Seigneur nous demande de construire : une Eglise qui vit pleinement la joie des rencontres, du dialogue ou des échanges fraternels. C’est de cette manière que, éclairés et soutenus par la lumière de l’Esprit, nous identifions ensemble les défis qui s’imposent à nous ; défis qui ne peuvent être relevés que dans la communion ecclésiale.

2. Au cœur de même cette célébration, l’Eglise Famille de Dieu qui est à Bangui se réjouit du don de nouveaux serviteurs de l’évangile, diacres et prêtres, don précieux que le maître de la moisson lui-même fait à son Eglise. En ce don l’Archidiocèse de Bangui discerne et reconnaît la tendresse et la sollicitude du Seigneur, qui pourvoit aux besoins de son Eglise afin qu’elle annonce à tous les hommes et à toutes les femmes la bonne nouvelle du salut. Notre Eglise particulière accueille, émerveillée, ces nouveaux diacres et prêtres avec gratitude et une grande espérance au Seigneur. Nous en rendons grâce !

3. En plus de la richesse de nombreux fruits recueillis, cette semaine, dans la réflexion sur la mission ; en plus de l’immense joie des ordinations diaconales et presbytérales de ce jour, un troisième motif vient donner une détermination particulière à cette célébration eucharistique. En effet, aujourd’hui, l’Eglise universelle célèbre la Journée Mondiale du Migrant et du Refugié. Dans le cadre de la célébration de cette Journée, le Saint-Père, le Pape François, se trouve en ce moment à Marseille, en France. En communion avec lui, prions pour que tous les baptisés ainsi que les hommes et les femmes de bonne volonté se montrent toujours plus attentifs et soucieux du sort des migrants et des réfugiés dans le monde. Pour l’Eglise en particulier, la question du migrant et du réfugié, l’un des défis majeurs de notre temps, fait partie intégrante de sa mission. Et sa sollicitude en ce domaine se fonde sur l’exigence de la fraternité et de la solidarité entre les hommes, au nom de l’Evangile. Il n’est donc pas possible, pour notre conscience ecclésiale, de rester indifférent aux conditions inhumaines dans lesquelles de très nombreux migrants et réfugiés vivent, qu’ils soient au dehors ou à l’intérieur de nos frontières. La mission de l’Eglise va jusque-là : accueillir, se mettre à l’écoute de ces frères et sœurs en humanité, les accompagner, les soutenir et les aider dans leur quête légitime des conditions de vie respectueuses de leur dignité.Chers frères et sœurs dans le Seigneur,

4. Les trois motifs de cette célébration se rejoignent tous dans une seule et même thématique mise particulièrement en lumière dans la liturgie de la parole de ce dimanche. Il s’agit, pour l’Eglise, d’annoncer l’évangile, et d’en éprouver l’urgence et l’exigence, pour le salut du monde. Cette mission, l’Eglise ne se la donne pas à elle-même, elle la reçoit du Christ Seigneur, par un mandat spécial : « Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit, leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit » (Mt 28, 19-20a). Ce mandat missionnaire met l’Eglise en situation de sortie, c’est-à-dire en capacité de « sortir de son propre confort et avoir le courage de rejoindre toutes les périphéries qui ont besoin de la lumière de l’Evangile »[1]. Dans cette « dynamique de l’exode », de sortie de soi et du don, l’Eglise se ravise continuellement qu’elle répond à un appel, qu’elle n’a pas et ne peut en aucun cas avoir un agenda personnel, puisque la mission reçue lui vient d’un autre, du Christ lui-même.  

5. Ne nous méprenons pas, la mission de l’Eglise se vit ou se déploie aussi bien sur le plan institutionnel que sur le plan informel. C’est la mission de toute l’Eglise, dans la diversité et la beauté des états de vie des membres qui la composent : évêques, prêtres, religieux et religieuses et fidèles laïcs. L’objectif que nous poursuivons est le même : la sanctification du monde par l’annonce de « l’Evangile à tous, en tous lieux, en toutes circonstances, sans hésitation, sans répulsion et sans peur »[2] et par l’excellence du témoignage de vie de chaque baptisé. Disciples missionnaires, nous le sommes tous, à la suite du Christ !

6. Vivre et réaliser la mission de l’annonce de l’Evangile nous impose le devoir de ne pas déserter les routes de celles et ceux qui partagent notre quotidien, et avec lesquelles nous partageons un même destin. La mission se vit en lien avec la réalité concrète du monde, telle qu’elle est, avec ses joies et ses défis, notamment les défis de paix et de justice, le défi de l’amour et de la solidarité humaine, le défi de la construction d’une société plus fraternelle, le défi du vivre-ensemble dans la concorde, pour le bien de tous. C’est en assumant ces défis comme relevant aussi de sa mission spécifique, que l’Eglise travaille à l’avènement du règne de Dieu. Il est donc nécessaire, dans ce travail pastoral, de réévaluer régulièrement le chemin parcouru. Pour cela on se posera lucidement des questions suivantes : sommes-nous bien encore sur le droit chemin ? Certaines de nos pratiques n’empêchent-elles pas les autres d’apprécier la lumière du Christ et de se laisser attirer par elle ? La capacité à se décentrer pour revenir au Christ, s’ajuster à lui ; l’humilité à se remettre en question, à se prémunir des délices du monde ; le courage d’affronter l’insécurité de la route de la mission… tout cela constitue une source de grande fécondité et de joie missionnaires. Car, en effet, Dieu n’abandonne jamais ceux et celles qu’il a choisis et envoyés !       

7. La mission de l’Eglise est au service de la vie, d’une vie pleine, belle et rayonnante. Elle est au service de l’homme qu’elle rejoint en ses aspirations existentielles les plus fortes et dont la plus ultime s’accomplit pleinement dans le Christ : « Je suis venu afin que les brebis aient la vie, et qu’elles l’aient en abondance » (Jn 10, 10). Cette « vie en abondance » est communion avec Dieu, dans la joie éternelle du face à face avec lui. Saisi de cette joie qu’il a découverte dans sa relation au Christ, la joie que le monde ne peut donner, saint Paul peut affirmer : « Pour moi, vivre c’est le Christ et mourir est un avantage » (Ph 1, 21). Tous les hommes et toutes les femmes sont appelés à jouir de cette joie en Dieu. Et l’Eglise, au nom du Christ, les accompagne et les soutient sur ce chemin de bonheur, mais qui demeure bien un chemin exigeant. Qui cherche Dieu d’un cœur sincère et droit le trouve, comme dit le prophète Isaïe : « Cherchez le Seigneur tant qu’il se laisse trouver ; invoquez-le tant qu’il est proche » (Is 55, 6). En écho à cette parole de consolation du prophète, le psalmiste redit et rassure : « Le Seigneur est proche de tous ceux qui l’invoquent, de tous ceux qui l’invoquent en vérité » (Ps 145, 18).    

Chers frères et sœurs dans le Seigneur,

8. Pour soutenir la quête de ceux et celles qui cherchent Dieu, pour offrir à son peuple les trésors du salut qui le sanctifient, l’Esprit Saint suscite divers charismes et ministères dans l’Eglise. Mais il faut pour cela que des cœurs généreux accueillent ces grâces et répondent à l’appel de Dieu en se mettant librement au service de l’Evangile, pour le salut du monde. C’est donc Dieu lui-même, en effet, qui appelle aujourd’hui Chris et Alain au diaconat ; c’est toujours lui qui appelle Gregory et Deogratias au presbytérat. Prions pour que leur ministère soit lumineux et fructueux, qu’ils s’ouvrent de tout leur cœur à la grâce de l’appel que le Seigneur leur adresse pour servir son Eglise. De cette manière, et avec la force que l’Esprit Saint donne, ils s’efforceront d’être à la hauteur de la confiance que le Seigneur place en eux.

9. En exprimant, au nom de l’Eglise, ma joie d’admettre ces jeunes à l’ordre du diaconat et du presbytérat, je voudrais d’abord rappeler que le diacre reçoit tout son sens de la figure même du Christ qui « est venu non pour être servi mais pour servir » (Mt 20, 28). Dans l’Eglise, ce qu’on attend du diacre c’est d’assumer généreusement « le ministère de la Parole, de l’autel et de la charité » active, spécialement à l’égard des pauvres et des blessés de la vie. Par l’imposition des mains de l’évêque, le diacre reçoit le don de l’Esprit Saint qui le fortifie pour servir d’un même élan le Seigneur et les hommes.

10. Dieu nous appelle tous et toutes, de par notre baptême, à œuvrer pour le salut du monde. Il n’appelle pas seulement les évêques, les prêtres, les religieux et les religieuses. Il t’appelle aujourd’hui, toi, chrétien de l’Archidiocèse de Bangui ! Engage-toi, réponds à son appel en fidèle ouvrier ! Toutefois pour que la mission confiée à l’Eglise soit crédible, gardons-nous du démon de l’exclusion et de la jalousie ; demandons au Seigneur la grâce de la conversion du regard que nous portons sur les autres qui, comme nous, sont des ouvriers de l’évangile. Réjouissons-nous d’être ensemble, chacun à sa place. Que chacune et chacun de nous déploie toutes ses énergies à vivre la grâce particulière reçue du Seigneur.


11. L’évangile que nous avons entendu est particulièrement riche d’enseignements. En effet, la parabole du maître de la vigne est vraiment déconcertante. Elle souligne très fort que Dieu n’agit pas à la manière des hommes (cf. Is 55, 8-9) : nous, les humains, nous sommes peu enclins au bonheur partagé. Nous préférons souvent célébrer les délices de la vie dans des cercles bien fermés. Nous succombons trop facilement au bas sentiment d’envie, de complexe ou de comparaison malsaine. En revanche, Dieu, le maître de la vigne, nous dévoile les profondeurs de son cœur de Père : j’ai ma place dans ce cœur brûlant d’amour ; je suis aimé d’un amour délicat, personnel et inconditionnel. De cette manière nous comprenons que l’alliance que Dieu a scellée autrefois avec le peuple d’Israël n’est pas exclusivement réservée à Israël : « La bonté du Seigneur est pour tous, sa tendresse, pour toutes ses œuvres » (Ps 144, 9), dit le psaume.

13. De ce point de vue, la parabole qui nous est proposée est d’abord une évocation claire de l’ancienne alliance, celle que Dieu a conclue  avec le peuple d’Israël. La parabole s’ouvre précisément par un mouvement initial du « maître d’un domaine qui sortit dès le matin afin d’embaucher des ouvriers pour sa vigne » (Mt 20, 1). C’est donc aux premières heures de l’histoire du salut que Dieu prit l’initiative d’aller vers Israël, pour lui proposer de consentir à vivre en communion avec lui, pour son bien. Puis, suivent d’autres sorties, d’autres mouvements qui peuvent renvoyer à des tentatives toujours reprises de renouvellement de son alliance. Dieu en effet ne se lasse pas d’inviter toute personne  assoiffée de la vie véritable. Mais le cœur du message de la parabole est la célébration de la joie de l’alliance nouvelle et définitive scellée dans l’offrande que Jésus a faite de sa vie sur la croix : « Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes » (Jn 12, 32). C’est précisément parce que nous sommes saisis par l’amour que le Christ nous a manifesté qu’à notre tour, nous livrons nos vies pour partager le bonheur inexprimable de la communion avec Dieu. « Allez, vous aussi à ma vigne ! »

14. Ainsi, pour collaborer à l’œuvre du salut en Jésus-Christ, l’Eglise est appelée à l’audace d’investir les routes des hommes. Elle doit donc être en situation de sotie pour rejoindre les hommes et les femmes là où ils vivent, avec leurs joies et leurs peines, leurs peurs et leurs attentes, leurs pleurs et leur espérance. En ce jour dédié au Migrant et au Réfugié, portons dans nos cœurs leur quête de sécurité et de meilleures conditions d’une vie pleinement humaine et digne. Brisons les murs du confort égoïste et de l’indifférence, ouvrons les yeux et osons prendre des initiatives pour riposter à la brutalité de cette réalité indigne de la condition humaine. Celle-ci se vit non seulement dans les autres pays mais aussi à l’intérieur des frontières de notre pays. Nous sommes tous frères et sœurs. Dans notre pays, la République Centrafricaine, les besoins essentiels exprimés par le Migrant et le Réfugié - besoin de sécurité, de paix, de santé, d’éducation et de scolarisation des enfants – ne peuvent être satisfaits que si nous arrivons à désarmer nos cœurs, par un appel renouvelé et pressant à la fraternité et à l’amour.

15. Rendons grâce pour le beau cadeau du renouvellement de l’élan missionnaire que le Seigneur nous fait aujourd’hui. Comblés de la joie et de la force de son Esprit, avançons sur les routes de la mission avec une détermination nouvelle. Que la Vierge Marie, Mère de Dieu et Notre-Dame de l’Oubangui, marche avec nous, et qu’elle nous obtienne de partager la joie du salut en Jésus-Christ.

+ Dieudonné Cardinal NZAPALAINGA, Cssp    

Archevêque Métropolitain de Bangui

 


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